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1)
La
déportation des prisonniers du combat de Pierrefitte:
Les rescapés de Pierrefitte .sont transportés en camions à Poitiers et sont parqués, avec 200
autres prisonniers, dans une cour au siège de la gestapo.
Lors d'un bombardement de l'aviation alliée, les sentinelles ennemies
tirèrent des rafales d'armes automatiques qui coûtèrent la vie à de
nombreux prisonniers dont
- Gaillard Jean, élève garde, + 12/6/1944 sur le chemin de la déportation à
Poitiers.
(Fils d'un sous-officier de la gendarmerie, Jean Marie Ange Gaillard,
né le 19 juillet 1925 à Juvigny-le-Tertre (Manche), s'engage le 11 mai
1944 pour trois ans au titre de l'École de la Garde.
Admis au 3ème stage, il effectue ses classes au 1er
peloton du lieutenant Doison, du 4ème escadron du capitaine
Séchaud. Pourtant, 4 semaines plus tard, cette formation de la Garde
passe aux Forces Françaises de l'Intérieur de la Creuse.)
Le lendemain, le 13
juin, les survivants, (Le capitaine Jouan - le chef
Doom, les élèves gardes Bonte, Bur, Cognard, Dechaume,
Dornier, Faivre, Hinterlang, Kloeckner, Labeur,
Mouyrigat ( Morraglia), Quennesson, Respaud, Reuter,
Rouy, Sauzet, Sentenac, Peuch et Rolland)
entassés dans des camions, sont transportés par
des SS au camp de transit et d'internement de Royallieu à Compiègne.
(Royallieu: Ici)
Ils sont ensuite
déportés par le dernier train qui partira de Compiègne pour arriver à
Buckenwald.
(un autre train partira le 25 août 1944 mais il sera définitivement
stoppé par l'action de la résistance et des cheminots qui en le
détournant sur la voie Péronne - Montdidier permettront à des soldats britanniques
et à des habitants du voisinage de libérer les prisonniers.)
Prévu pour le 14 août, le départ sera retardé suite à l'action de
deux résistants de Vieux Moulin qui ont fait sauter la locomotive.
Le départ se fera le 17 août 1944.
Au lieu de faire le trajet, à pied, du camp au quai (devenu depuis le
"quai des Déportés") de la gare de Compiègne, les 1242
prisonniers sont transportés, en camions, vers un train en attente
stationné au carrefour Béllicart, en forêt de Compiègne, car les ponts
et les voies de chemin de fer sont détruits par l'aviation alliée.
(Voir discours de Pierre Bur ici)
Ils sont entassés dans des wagons à bestiaux.
Le train partira le 18 août. Il est arrêté à Soisson et à Reims par
le consul de Suède, Raoul Nording, qui tente sans succès d'empêcher son
départ.
Le 22 août
1944, le train fait son entrée à Buckenwald.
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L'évasion de deux
élève gardes:
Les élèves gardes
René Rouy et Robert Rolland réussissent à s'évader du train le 27
août 1944 à 2 km de la gare de Saint-Hilaire-au-Temple dans la Marne.
Séparés par la nuit et les tirs de F.M., Rolland est hébergé et caché
à Reims, alors que Rouy, qui veut rejoindre ses parents dans la Meuse,
handicapé par une entorse est repris, le matin du 21 ou du 22 août, par
deux agents de la gestapo dans la maison isolé où il est
réfugié.
Il est emprisonné à Châlons-sur-Marne, mis au secret,
"interrogé" à 3 reprises par les gestapistes.
Il n'avoue pas son évasion du train mais connaît jusqu'au 28 août de
durs moments.
Les alliés approchant, la prison de Châlons est évacué le 29 août et
au moyen d'autobus parisiens les prisonniers sont transférés à Belfort
où ils connaissent un bombardement dans la nuit du 30 au 31 août.
Le 31 août, entassés, avec d'autres, de nouveau dans des wagons à
bestiaux, il arrive après un voyage très éprouvant de 5 jours où les
morts sont nombreux, au camp de concentration de Neuengamme près de
Hambourg.
Il y reste jusqu'au 28 avril 1945.
Atteint du typhus, ayant contacté une tuberculose pulmonaire, à la
libération du camp il n'est rapatrié en France qu'en septembre 1945.
Il est radié des cadres de l'armée le 30 juillet 1946 et mis à la
retraite d'office pour "infirmités incurables". Il avait 20 ans
...
Il conclut son
récit par ses mots:
"Voilà un bref récit de mes aventures. il y a sans aucun doute
beaucoup de détails qui manquent; ce que j'ai dit est sûrement mal dit
mais le temps estompe le souvenir et après trente deux ans ma mémoire
est loin d'être infaillible. Quoiqu'il en soit je suis persuadé que
nous avons connu des événements tellement dramatiques qu'il faut
continuer à en parler... pour que de tels faits ne se reproduisent plus
jamais."
ce récit est ici: https://sites.google.com/site/kommandodeneustassfurt/home/2-notre-histoire-1/le-transfert-en-allemagne-1
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Le Kommando de Neu
Staßfurt:
Le 13 septembre 1944, la moitié des survivants du train, est transférée
à 200 km, au Kommando de Neu Staßfurt pour travailler dans des mines de
charbon net de sel de potasse.
Disparaissent
en déportation:
- Jouan Maurice, capitaine de l'École de la Garde, + en déportation (
pas trouvé sa trace dans "mémoire des hommes");
- Labeur Gérard, élève garde, ° le 17/10/1925 à Bitche (57), disparu
le 4/4/1945 en Allemagne;
- Quennesson Joseph, élève garde, matricule de déporté
78650, ° le 19/7/1923 à Escheu (59), mort
d'épuisement le 10/3/1945 au camp de Neu Staßfurt, exhumé en 1980;
- Respaud André,
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La
'todesmarsch'',
la "marche de la mort":
Neu Staßfurt est évacué le 11 avril 1945 devant l'avance alliée pour
la 'todesmarsch'',
la "marche de la mort". Il fallait suivre le rythme sous les
coups. Cette marche dura un mois.
A la moindre chute, la colonne piétinait celui qui était tombé où les
SS de flanc garde ou en queue de colonne se chargeaient de l'achever d'une
balle dans la tête.
Le 17 avril, à Ober Audenhein, les SS trouvant que le
tombereau-infirmerie ralentissait trop la colonne le supprimèrent ainsi
que ses 17 occupants...
La route s'arrête le 8 mai 1945 à Annaberg, une ville allemande à la
frontière tchèque où abandonné par les SS, ils sont libérés par les
soldats russes.
Au départ, il y a
environ 350 français, 300 polonais et 50 russes.
366 kilomètres furent
parcourus, sur 650 à 700 hommes au départ les soviétiques libérèrent
62 personnes. il y eu 138 morts et 38 disparus qui furent certainement
assassinés.
Ils seront rapatriés pour la France le 21 mai 1945.
- Sauzet Pierre, élève garde, matricule de déporté
78649, ° le 23/1/1926, mort le 18/4/1945 à Friedersdorh ( pas trouvé sa trace dans
"mémoire des hommes"). Il est inhumé à Tharan.;
- Dechaume André,
élève garde, matricule de déporté 78635, ° le 6/3/1926 à Soleymeux (42), + tué le 21/4/1945 à
Klingenberg (Allemagne). mort d'épuisement sur la route à l'évacuation
du commando;
"C’est le
21 avril 1945, que nous nous sommes quittés André et moi, sur une route
d’Allemagne du côté de Klingenberg. Accrochés l’un à l’autre,
nous marchions pieds nus, revêtus de nos seuls pyjamas rayés qui à l’époque
était l’uniforme des bagnes nazis. Trois tueurs, trois SS, braquaient
leur arme dans nos reins attendant que nous tombions pour nous loger une
balle dans la tête. Par chance, j’étais encore lucide bien que fort
affaibli. Mais lui était déjà dans l’au delà. Il avançait tel un
automate… un pas… encore un pas… et toujours un pas. Il avait
tellement lutté les jours précédents pour cacher son mal, un abcès
purulent, qui rongeait sa jambe. Il ne voulait pas se montrer en position
de faiblesse, il ne l’a jamais voulu d’ailleurs tout au long de sa déportation.
4 jours auparavant il venait d’échapper au massacre de ceux qui avaient
pris place dans le tombereau qui leur servait d’infirmerie, et il
m’avait rejoint dans cette colonne de tondus, de rayés, d’êtres décharnés
rongés par la vermine, de sous hommes. « Untermenschen »
disaient les nazis
...
A la limite de l’inconscient, André, tenait toujours, il voulait tenir,
encore tenir. Il ne sentait ni sa jambe, ni ses pieds ensanglantés, il était
au delà du stade de la douleur … jusqu’à ce que la mort le saisisse
et l’emporte… debout ! Le SS l’a arraché de mes bras et a jeté
sa dépouille dans le fossé. Je restais là, prostré, totalement paralysé,
pleurant toutes les larmes que je n’avais jamais versées depuis notre
arrestation. Alors, un de nos compagnons, Marcel
Vaillant, qui lui aussi essayait de le sauver, m’entraîna de force pour
rejoindre la colonne qui s’éloignait m’arrachant ainsi à une mort
certaine.."
(témoignage
de Pierre Bur)
- Duloué Joseph,
maréchal des logis-chef, matricule de déporté 78583, ° le
22/1/1911, mort de dysenterie le 18/4/1945 entre Bockwitz et Raitzen;
" Joseph marie
Duloué arrive au monde le 22 janvier 1911, à Arjuzaux, dans le
département des Landes. Appelé au 121ème régiment
d'infanterie le 15 avril 1932, il est promu, coup sur coup, caporal puis
caporal-chef; un an plus tard, il obtient un certificat de bonne conduite
et passe dans la disponibilité.
Affecté à la 9ème légion de la Garde républicaine mobile
dont l'état major se trouve à Courbevoie, il est nommé élève-garde le
4 septembre 1936, garde à pied l'année suivante et prête serment devant
le tribunal de 1ère instance de la Seine peu après.
Le 15 février 1940, son unité devient la 23ème légion de la
Garde républicaine mobile, l'une des composantes de la brigade mixte de
gendarmerie, aux ordres du général de division Gest, qui fait partie de
l'armée de Paris. Au cours de la campagne de France, il combat du 10 mai
au 13 juin 1940, et reçoit la Croix de guerre avec cette citation à
l'ordre du régiment: "sous-officier d'un dévouement absolu, a
rassemblé et animé son groupe de mitrailleurs, chargé dans un moment
critique, de soutenir un barrage antichar, après une longue résistance,
s'est replié sur ordre, en rassemblant tout son personnel et son
matériel."
A l'automne 1940, il est nommé sous-officier de carrière et passe à la
2ème légion de la Garde, dont le siège est à Marseille.
Là, il obtient le brevet de chef de section, est promu maréchal des
logis-chef au 4ème escadron le 1er mai 1944. A la
même époque, il est détaché comme instructeur à l'École de la Garde
de Guéret et, le 7 juin suivant, il passe aux Forces Française de
l'Intérieur de la Creuse.
Dans son rapport sur son décès, le capitaine Mathé écrit: " Le 11
juin 1944, les éléments de l'École de la Garde stationnés dans la
région de Janaillat, à 30 km au sud de Guéret, furent attaqués par des
éléments blindés et des troupes portées. Au cours de l'action, 42
militaires de l'École de la Garde furent faits prisonniers. Le maréchal
des logis-chef Duloué, qui commandait un groupe de combat du 3ème
escadron, placé sous les ordres du capitaine Séchaud qui fut tué,
fut fait prisonnier avec une grande partie de ses hommes.
Emmené en captivité, il fut interné à Compiègne jusqu'au 17 août
1944, puis déporté à Buckenwald avec ses camarades. D'après les
renseignements receuillis auprès de ses camarades de captivité, il resta
à Buckenwald jusqu'au 11 avril 1945, date d'évacuation du camp, et
serait décédé le 19 avril 195 à Laaz. Les circonstances de sa mort
n'ont pu être précisée."
Plus tard, on apprendra qu'il est mort " à la suite de privations,
fatigue, souffrances, mauvais traitements et maladie" dans la région
de Torgau, en Allemagne.
Sous la IVème République, le Gouvernement lui décerne, à
titre posthume, la Médaille militaire pour " faits exceptionnels de
guerre et de résistance" et la Croix de guerre 1939-1945 avec palme
avec ce libellé de citation: " Ayant rallié les Forces françaises
de l'intérieur le 6 juin 1944, a participé aux durs combats de la
Creuse. Fait prisonnier, est "Mort pour la France" en
captivité."
Par ailleurs, il obtient la médaille de la Résistance française, la
Médaille de la déportation et de l'internement pour faits de
résistance, le certificat de déporté et d'interné de la Résistance et
a été classé dans la catégorie n° 1 par le jury d'honneur des
déportés.
Actuellement, son nom est gravé sur le monument aux morts de son village
natal des Landes et il est porté par les élèves-gendarmes de la 225ème
promotion de l'école de gendarmerie de Montluçon.
source: http://lapinot51.free.fr/Garde/2014/page12.htm
- Reuter Edmond, élève garde, ° le 22/7/1922 à Charency-Vézin (54), +
le 20/6/1945 à l'hôpital de Bir Rakem à Baden Veiler, mort en
déportation.
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En
1960, il est décoré à titre posthume de la médaille militaire, de la
croix de guerre de 1939-1945 avec palme et de la médaille de Résistance
Française.
Ill
est cité à l’ordre de l’armée (à titre posthume) en 1960 :
« Magnifique patriote. Arrêté pour faits de résistance le 11 juin
1944, a été interné jusqu’au 16 août 1944. Déporté le 17 août
1944 dans un camp de concentration,
est
mort glorieusement pour la France le 20 juin 1945, des suites de mauvais
traitements ».
Il est choisi comme parrain de la 406ème promotion de l'école
de gendarmerie de Chaumont (52)
Ils ont rendu hommage au
garde Reuter ici: http://promo406.chez-alice.fr/Accueil/parrain/HISTORIQUE%20DU%20GARDE%20REUTER%20EDMOND.htm |
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Ils
sont rentrés:
- Bonte Paul, matricule de déporté 78705, ° le 23/4/1926, s'est
évadé à Kurort-Harta, rentré.
- Bur Pierre, matricule de déporté 78617, ° le 4/2/1926,
libéré à Annaberg, rentré; ( Président et membre du conseil
d'administration de "l'amicale
des Déportés à Neu-Stassfurt"
- Hinterlang Guy |
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L'emprisonnement
et la déportation du futur général Véran Cambon de Lavalette
(° 18/12/1923, + 26/1/2014) dans "de
la Petite-Bastide à la Résistance et au camp de Dachau",
élève garde à l'époque.
Suite de la page 5.
Je suis embarqué dans
une voiture sous bonne garde. Débarqué à Monteil-au-Vivcomte, village
grouillant de soldats, confronté à un officier qui me présente des
cartes auxquelles je ne comprends rien mais fait semblant de
m'intéresser. Il est question de parachutage. N'y ayant pas participé,
je ne peux que jouer l'idiot, ce que comprend bien l'homme, sans cependant
apprécier, car la confrontation se termine par un uppercut qui "me
met au tapis".
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Deux
hommes se saisissent de moi et m'évacue vers ce qui sera ma prison pour
vingt quatre heures.
Je dois traverser, sur ce qui me parait être le foirail du village, la
foule des soldats. Ils sont de type mongol, portent sur le haut de la
manche gauche l'inscription "URAL". Très réjouis de voir un
prisonnier, ils m'insultent au passge en faisant du tranchant de la main
en travers du cou ce signe traduisible dans toutes les langues et qui
n'était pas fait pour me remonter le moral.
Dans ma geôle, une
soupente où on ne peut se tenir que couché, dans la paille , je trouve
trois jeunes garçons, accablés comme moi par le sort.
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Nous
parlons peu.
Le lendemain matin , nous
sommes extraits et conduits vers un camion à benne découverte, où nous
prenons place sur des bancs de bois, face à la marche, six fusils
braqués dans notre dos par six mongols impassibles.
Était-ce le peloton d'exécution ?
Jusqu'au poteau un espoir subsiste. Le mien était particulièrement
ténu. Au moment de monter dans la benne, j'ai du passer près du
chauffeur. Celui-ci m'a dit sans me regarder, dans un français parfait:
- "On va vous fusiller, j'essayerai de simuler une panne. Tachez
de vous évader."
Pouvais-je avoir confiance dans ce Français aux ordres des Allemands ?
Pendant les kilomètres qui ont suivi, je n'ai fait que réfléchir à
cela. Le lieutenant m'avait dit que j'étais son prisonnier et j'avais
tendance à le croire.
Un autre a-t-il voulu m'éliminer sous couvert d'une tentative d'évasion
?
Mourir à vingt ans n'est pas une petite affaire et j'ai du jouer ma mort
à pile ou face. Je devais décider sur le terrain.
Le véhicule un moment isolé du convoi, son moteur donne effectivement
des marques de faiblesse. Le chauffeur descend, ouvre le capot. Je regarde
mes trois compagnons d'infortune. Ils ne font aucun signe. Le bois voisin
est bien loin pour espérer l'atteindre en courant seul sous le tir de six
fusils. Est-ce là le piège ? Si ce n'est pas un piège, lorsque
finalement nous repartons, c'est vers le "vrai" peloton
d'exécution. Je pense aux paroles du Lieutenant Guillot sur le sentier de
Guéret.
Kilomètre par kilomètre je guette l'apparition du mur ou de la carrière
que je n'ai cessé d'imaginer.
Et nous arrivons à ... Bourganeuf.
Tout était mensonge, ou ordre contraire.
Devais-je tomber sur le bord de la route ?
Ai-je manqué l'occasion de retrouver la liberté et de poursuivre le
combat ?
Soixante ans après, ces questions sans réponse occupent parfois rêves
ou insomnies.
Provisoirement
débarrassé, en une matinée, des menaces d'exécution sommaire ou de
peloton réglementaire, une épreuve m'attendait, surtout morale, au pied
de la "Tour Zizim".
Debout, en civil ou en uniforme de la Milice, jeunes ou vieux
collaborateurs éructaient leurs injures et crachaient sur ces
terroristes, traîtres à la Patrie, qu'une juste punition attendait.
Les cachots de la tour,
tout au haut d'un escalier à vis dont, brutalement poussé par un S.S.,
je ne m'attardais pas à admirer la courbe médiévale, m'arrachèrent à
cette scène indigne.
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Pour
la première fois de ma vie,, j'avais eu honte de mon pays. Je ne
l'imaginais pas dans cette ignominie.
Là, couché sur la pierre nue, coupé du reste du monde, aspiré malgré
moi comme dans un gouffre de désespoir, j'ai compris le sens du mot
Liberté.
Et pourtant je n'était pas seul. Sortant d'un lourd sommeil, le
lendemain, j'ai vu un homme debout, en uniforme, qui me regardait
derrière des barreaux, à un angle de ma geôle. C'était le Lieutenant
Colonel Marty, l'officier instructeur "auto" et chef des
services techniques de l'École. Il occupait le cachot, il me dit quelques
mots de réconfort. C'était un homme calme, réfléchi et apprécié des
élèves.
Savait-il le sort qui l'attendait ?
Ce n'est qu'à mon retour de déportation que j'appris les horribles
tortures qu'il avait subi, et sa fin misérable dans un charnier de
Clermont-Ferrand.
Cher Colonel Marty !
Par son martyre, dans la simplicité du professeur qu'il était resté
pour nous, il mérite une place d'honneur dans l'historique des
"Cadets de la Garde". |
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Dans
le transport de Bourganeuf à Clermont-Ferrand, j'ai rencontré, parmi une
cinquantaine de prisonniers, des camarades et des Gardes qui dans le
maquis, avaient eu des parcours différents, mais dont j'allais désormais
partager le sort.
Le Garde Caron, survivant de l'équipe du Colonel Marty,
ses camarades Chaumont, Donzey, Chausse, l'aspirant Roger
Abadié, les élèves-Gardes de la Haye Saint-Hilaire, Fourneret,
Bergue.
Après deux nuits
passées dans un collège de Montluçon, nous arrivâmes le 23 juillet à
19 heures 30 à Clermont, place de l'Isle, où nous attendait la Milice en
son quartier général. Là, des miliciens nous maintinrent longtemps
debout, sans bouger, sous la menace d'un pistolet-mitrailleur, pendant
qu'il procédaient à de brefs interrogatoires d'identité. Puis
brusquement, brutalement, ils nous firent entasser' à coups de pieds et
de poings dans un fourgon cellulaire, étouffant, serrés les uns contre
les autres, démarrant en trombe.
Là j'ai entendu des cris de désespoirs. "On va nous fusiller
!"
Nous débarquons dans la
caserne du 92ème Régiment d'Infanterie.
C'est un sursis.
On nous conduit dans une vaste cellule dite "H4" où une
cinquantaine de paillasses sont alignées.
Elle est vide car, nous dit-on, elle avait contenu des otages, récemment
fusillés en raison de "l'assassinat" d'un collaborateur.
C'est ici que, pendant presque un mois, nous avons dormi, dévorés par
les punaises, entendu chaque matin le soldat surnommé
"Fernandel" lire la liste des appelés pour l'interrogatoire de
la Gestapo, ou celui, plus redouté de la Milice. Et puis, ce sera la
découverte de "l'univers concentrationnaire", Struthof, Dachau,
Allach ...
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J'ai
su, beaucoup plus tard, lorsque témoins et historiens se furent penchés
sur ces événements, que j'avais été victime d'une vaste opération
montée systématiquement et sur renseignements pour anéantir toute
résistance en Creuse, conduite par le général Von Jesser. La répression
fut cruelle.
Pour l'École de la Garde, l'exemple le plus dramatique est l'attaque
menée contre le détachement technique du Lieutenant-colonel Marty
(lui même mort plus tard sous la torture de la Gestapo:
six Gardes (Chavalet, Etienne, Leroux, Lambert,
Hilaret, Henrick) massacrés après avoir creusé leur
tombe.
Elle a eu aussi à déplorer la mort au combat du Maréchal des Logis
Chef Bongeot et de l'élève Garde Verdier, l'assassinat du Maréchal
des Logis Perlet et des gardes Sirveaux et Champion,
blessés et achevés, tous trois en défendant le P.C. et quinze
prisonniers déportés dont six morts en déportation: les Gardes Catalifaud,
Marès, Petit, Ravoyard, Roux et l'élève
Garde Castelin.
Du 20 juillet au 20
août 1944, nous étions une cinquantaine de "rescapés"
(nous avions échappé au peloton d'exécution ou à l'exécution sommaire
au moment de la capture) vivant dans la cellule H4 de la prison qui avait
été celle du 92ème Régiment d'Infanterie de Clermont. Nos
geôliers nous avaient bien prévenus: ce local était libre parce que nos
prédécesseurs, otages, avaient été liquidés à la suite de
"l'assassinat" d'un collaborateur.
Cinquante paillasses douteuses étaient le long des murs constellés de
trous, d'où jaillissaient chaque nuit des centaines de punaises, et de
taches rouges du sang qu'elles avaient bu avant de se faire écraser.
Chaque matin, après la distribution de jus de gland torréfié, un S.S.
lisait la, liste de comparution pour la Gestapo ou la Millice.
Les premiers retours nous donnèrent une idée de la sauvagerie des
interrogatoires.
On s'accordait à penser que la Milice était la plus à redouter.
Mon camarade Saint-Hilaire, un des premiers, ne remettait plus sa
chemise sur la peau ensanglantée de son dos.
Il fut vite avéré que la Gestapo connaissait tout de l'École de la
Garde dont elle avait sans doute saisi les archives.
Les victimes des tortures estimaient que c'était par sadisme.
Le camarade Fourneret apprit par son interrogatoire qu'il y avait
eu capture d'un officier de marine allemand !
Nous ignorions presque tout de ce qui s'était passé tout près de nos
cantonnements. D'ailleurs, nous savions que nous étions les dernières
victimes de la répression.
Sur le terrain, nos chasseurs S.S. étaient devenus gibier à leur tour.
Peu à peu les séances s'espacèrent puis s'arrêtèrent.
Elles continuaient pour d'autres, ceux des réseaux qui avaient de vrais
secrets.
Lors de la séance quotidienne de promenade, j'ai pu voir un homme au
torse découvert montrant, alignées et en rang, comme une écriture sur
tout son dos, des découpures en forme de V pratiquées avec la pointe
d'un couteau, méthodiquement, jusqu'à obtention de l'aveu. Il n'avait
pas parlé !
...
D'après le livre de Claude Cazals, "La Garde sous Vichy",
à la même époque, une dizaine d'officiers de la Direction de la Garde,
arrêtés par la Gestapo alertée en particulier par le passage de l'École
de Guéret à la Résistance, étaient détenus dans les cellules
voisines:
dans la cellule H1:
le Lieutenant-colonel Robelin,
les chefs d'escadrons Bouchardon, Comemale,
le capitaine Garraud.
dans la cellule H2:
les chefs d'escadrons Tharaux, Lacroix, Jeandel,
les capitaines Grange, Puthoste,
le capitaine Morand,
qui devait mourir à Mauthausen, et au secret dans un cachot.
Tous seront interrogés
et torturés par la Gestapo de Clermont à la "Villa René" à
Royat.
Un mois était presque
passé et je n'avais pas été appelé. La discipline semblait se
relâcher proportionnellement à l'avance des Alliés. L'espoir d'une
libération apparaissait, bien vite déçu.
Le 19 août, la
décision d'évacuer la prison était prise.
Curieusement les interrogatoires reprenaient mais à cadence accélérée.
La bureaucratie allemande ne pouvait pas se dessaisir de ses sujets sans
établir des fiches en règle. Mais la Gestapo ne régnait plus. Un
officier de la Wehrmacht menait un interrogatoire rapide et succinct. Il,
fit même taire son collègue gestapiste, qui voulait avoir plus de
détails, en affirmant:
- "C'est un soldat, il a obéi aux ordres."
Un autre exemple de la "bonté" des geôliers: le soir même, un
aumônier militaire allemand venait dans une cellule donner une absolution
générale aux catholiques qui le désiraient. Ce n'était pas une
cérémonie très gaie. Ce n'était pas l'extrême-onction, mais elle
laissait présumer un avenir "incertain". Je découvris
cependant la joie d'un camarade plus âgé qui, l'estimant sans doute
compétent en théologie, me demanda si cette formalité effacerait tous
les péchés de jeunesse dont il ne s'était jamais confessé !
Naturellement je le lui avais assuré.
Le 20 août 1944,
un mois exactement après notre arrivée, nous partons pour la gare de
Clermont, fortement encadrés par l'armée allemande. Il y a cinq wagons
à bestiaux. Les officiers de la direction de la Garde sont dans le
premier. Le Lieutenant Colonel Robelin n'y est pas. Il vient
d'être assassiné dans sa cellule.
Aussitôt entassés à
cinquante par wagon à bestiaux, nous démarrons, sans doute le dernier
train en partance pour l'Allemagne.
Déjà habitués à serrer les coudes dans le milieu firt hétéroclite
qui est désormais le nôtre, nous parvenons à rester groupés; ceux de
H4, et, naturellement, plus étroitement ceux de la Garde:
Abadié, Saint-Hilaire, Fourneret, Chaumont, Donzey, Caron, Chausse et
quelques autres.
Coïncidence, ce même 20
août, le Maréchal Pétain, après avoir le 19 déclaré au général
Perré (Directeur de la Garde) qu'il relevait ses officiers et ses
hommes de leur serment de fidélité (il était temps !), laissait une
compagnie de S.S. forcer les grilles de l'Hôtel du Parc et l'emmener à
Sigmaringen.
A peine enfermés, nous
"postons" sur la voie, par les interstices du plancher, des
messages destinés à nos familles.
Quelques-uns aboutiront, grâce à la chance et au dévouement de
cheminots. Mais les Allemands veillent. Mes parents ne seront avisés de
ma (probable) capture que par mon camarade Gailard qui, à ma
recherche, explorera tous les charniers, découvrira le fusil mitrailleur
saboté que j'avais caché, et en déduira que j'avais été fait
prisonnier. Mais ils resteront longtemps sans nouvel de mon destin. Quand
à nous, nous savions seulement que nous partions vers l'est.
Un premier incident se
produisit le soir même, dimanche 20 août, en gare de Riom. Arrêt
dû officiellement à des travaux sur la voie. Nous pensons que déjà la
Résistance agit. Nerveux, les soldats de l'escorte repoussent les
bénévoles qui veulent nous ravitailler et tirent en l'air.
Serrés à 50 par wagon, nous nous rendons compte que nous ne pouvons pas
nous coucher sur le plancher.Le"s jambes, les corps sont emmêlés.
Impossible de s'allonger.
Nous ne savons pas encore que cela va durer dix jours et dix nuits !
C'est à Paray-le-Monial
que nous avons vécu, le mardi 22 août, la plus grosse émotion.
Arrivés à 7 heures, des coups de feu éclatent de toutes parts. Cette
fois c'est vraiment la Résistance.
Enfermés, nous assistons impuissants à l'action, observant à travers
les barbelés qui barrent les étroites fenètres, plaqués bientôt au
sol à écouter siffler les balles. Couchés le long des rails, nos
gardiens ripostent et le combat s'éternise. L'espoir s'envole brusquement
quand un train blindé arrive en gare. La contre-attaque allemande est
brutale. Un résistant prisonnier est amené sur le quai et abattu devant
nous.
Le train repart à 17
heures mais la voie a été coupée et les Allemands ont installé, sur
une plate-forme devant la locomotive, un char prêt à tirer en cas
d'embuscade.
Après de nombreux
arrêts, on nous autorise un ravitaillement en eau le 23 août
seulement, et de la nourriture apportée par la population le 24.
Nous avions vécu plus de quatre jours avec une boule de pain ! et des
émotions.
Le 26 août,
arrêt à Dijon dont la gare de triage est en ruine.
Puis le train est
mitraillé à Genlis et la voie bombardée. On voit évoluer des avions
alliés. Hélas rien n'arrête la marche.
Nouvel incident le 28,
près de l'Isle-sur-le-Doubs. Des tirs en rafale par les armes qui
flanquent le train, puis un brusque arrêt signale une évasion. Suit une
fouille brutale des différents wagons et des menaces de mort pour toute
récidive. Deux camarades ont été écrasés en sautant. Cinq, sur les
six repris le lendemain ont été fusillés.
Le 30 août,
après dix jours d'enfermement et d'aventures, les portes du wagon
s'ouvrent enfin dans la gare de Rothau en Alsace.
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Des
SS, avec leurs chiens font débarquer brutalement les prisonniers.Il y a
la tous les fonds de prison de Clermont, vieux prisonniers chevronnés,
jeunes résistants rescapés des derniers combats. Parmi nous, deux hommes
inspirent le respect des camarades et la hargne des S.S. :
Monseigneur Piguet (1), évêque de Clermont-Ferrand, critiqué
pour son loyalisme au regard de l'autorité mais persécuté pour avoir
dénoncé la barbarie nazie et aidé des juifs à fuir l'holocauste, et le
prince Xavier de Bourbon-Parme, noble figure de l'aristocratie française
et européenne et de la résistance française.
C'est par une marche de huit kilomètres, baïonnettes dans les reins et
attaques des chiens que les prisonniers sont transférés au camp du
Struthof.
...
(L'auteur décrit les dures conditions de la vie dans ce camp.)
...
Sur ce chemin de croix, il nous restait une station à atteindre. Nous
étions encore en terre française. L'offensive alliée progressait vers
l'Est, de Paris libéré par Leclerc le 23 août, de la vallée du Rhône
avec de Lattre. La guerre ne pouvait durer ... nous ne savions pas que
nous devions connaître les mêmes épreuves, mais en terrre allemandes et
pendant huit longs mois où l'hiver bavarois nous guettais, luttant pour
survivre, affamés, transis, malades, parias dans un monde finissant en
apocalypse.
La nuit du 2 au 3
septembre sont brûlés les corps de centaines d'hommes (392), dont les
membres du réseau Alliance (107), qui ont été massacré après leur
rapatriement du camp de SchirmecK.
Le lundi 4 septembre
1944, à trois heures du matin, c'est le branle bas de combat.
A six heures, en rang et colonne par cinq, comptés et recomptés, nous
reprenons en sens inverse les huit kilomètres qui nous séparent de la
vie civilisée et de la gare de Rothau. Nous partons pour l'Allemagne.
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1)
Monseigneur Piguet, décédera à Clermont-Ferrand le 3 juillet 1952. Il a
reçu la médaille des "justes parmi les nations" de Yad Vashem,
le 22 juin 2001. Ce sera le seul évêque français déporté. |
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Le
4 septembre 1944, c'est l'embarquement à Rothau dans des wagons à
bestiaux.
Strasbourg, Karlsruhe, les environs de Stuttgart, Munich.
Le 5 septembre 1944,
c'est l'entré dans le camp de Dachau.
A partir du 23
septembre 1944 jusqu'au 26 avril 1945, commando de travail à Allach
dans l'usine BMW.
Les 27 et 28 avril
1944, c'est le départ des S.S..
Le 30 avril 1945, les
américains libèrent le camp mais les déportés, à cause du typhus y
seront "confinés" jusqu'au 25 mai.
Après une inspection du
général, le 26 mai 1945, les camions de la 1ère
Armée Française de de Lattre de Tassigny emmènent les convalescents à
l'ile de Reichenau, sur le lac de Constance. Dans une énorme colère le
général en avait expulsé les habitants pour en faire un centre de repos
et de transit.
Après un court séjour,
c'est enfin la libeté;
Un train sanitaire de la Croix Rouge embarque les ex prisonniers dans une
traversée de la Suisse. Mulhouse, Paris ... |

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